Saints et martyrs de l’Ethiopie
Saints et martyrs de l’Ethiopie
A la suite des chrétiens d’Egypte, ceux d’Ethiopie s’étaient séparés du reste de l’Eglise pour une querelle de mots. L’Eglise avait défini qu’en Jésus il n’y avait qu’une seule personne ; ensuite il avait fallu préciser qu’en lui il y avait deux natures, la nature divine et la nature humaine. Les coptes (c’est devenu le nom des chrétiens d’Egypte, par déformation du nom grec qui signifie égyptien) crurent que dire deux natures revenait à dire deux personnes et firent un schisme. Par la suite l’invasion musulmane acheva de les isoler du reste du monde chrétien. Toutefois quand les Portugais arrivèrent sur les côtes de l’Afrique Orientale, ils vinrent au secours des Ethiopiens attaqués par les musulmans venus du Soudan : quatre cents mousquetaires envoyés par le roi du Portugal permirent à l’Ethiopie de rester indépendante et chrétienne.
A partir de ce moment des missionnaires catholiques vinrent en Ethiopie pour tenter de ramener ses habitants à la pleine communion avec l’Eglise catholique. Ce ne fut pas sans difficultés !
Les bienheureux Agathange de Vendôme et Cassien de Nantes
C’étaient deux Frères Capucins. Le premier, Agathange Nourry, né en 1598, fut missionnaire en Syrie puis en Egypte avant d’être envoyé en Ethiopie. C’est là que l’accompagna Cassien, fils de Jean-Lopez-Neto né en 1607. Arrêtés pour avoir prêché la religion catholique aux coptes, ils furent conduits à Gondar où résidait le Négus Basilide et où ils furent condamnés à mort et exécutés le 7 août 1638. Ils ont été béatifiés en 1904 par le Pape Saint Pie X.
Saint Justin de Jacobis (1800-1860)
Né en 1800 dans un petit village du Sud de l’Italie, Justin est le septième des quatorze enfants de la famille très chrétienne de Jean-Baptiste et Joséphine Muccia. En 1824 il est ordonné prêtre chez les Lazaristes, la congrégation fondée en France par saint Vincent de Paul. En 1839, suite à sa rencontre avec un missionnaire revenu d’Ethiopie, le Père Georges Sapeto, et ses supérieurs ayant donné leur accord, Justin est nommé préfet de l’Abyssinie.
Sa douceur et son humilité lui permettent de toucher les cœurs, et Ubié, le prince de la région où il s’est installé, l’admire beaucoup. Il lui demande même de conduire une délégation vers le patriarche copte orthodoxe d’Alexandrie pour lui demander un évêque. En effet Il y avait alors un seul évêque orthodoxe pour toute l’Ethiopie, et il était nommé par le patriarche copte orthodoxe d’Alexandrie. Comme en 1840 le poste était vacant depuis onze ans, une délégation fut envoyée en Egypte auprès du patriarche. Saint Justin, invité à s’y joindre, hésita, mais accepta après avoir obtenu que la délégation passe aussi par Rome après avoir rencontré le patriarche.
Malheureusement le nouvel évêque ainsi nommé, qui avait été formé par des protestants, va devenir jaloux de Justin et va le faire expulser par le Négus Théodore qui a renversé son prédécesseur Jean III (celui-ci, avant de mourir, deviendra catholique). Conduit jusqu’à la côte, il est alors confié à des gardes musulmans pour lesquels l’évêque orthodoxe avait rédigé des instructions en arabe : le prisonnier devait mourir – ce que voyant, les soldats musulmans le relâchèrent !
Ordonné évêque, Justin sera réadmis et réexpulsé plusieurs fois. Au cours d’un séjour en résidence surveillée à Moncullo en face de l’île de Massawah, il fait construire une église pour les catholiques de passage dans ce port. Il mourra en 1860, après qu’un de ses disciples ait été martyrisé. Il s’agit du Bienheureux Ghébré-Michaël.
Le Bienheureux Ghébré-Michaël
« Ghébré » est un préfixe par lequel commencent beaucoup de noms en Ethiopie, il signifie « serviteur de » et ne peut être séparé du nom de saint qu’il accompagne. Né à Dibo dans le Godjam (Nord de l’Ethiopie) en 1790, dans une famille copte-orthodoxe, Ghébré-Michaël fait profession monastique à Mertule Maryam en 1816. Comme la plupart des moines coptes, il ne se prépare pas au sacerdoce. Jusqu’en 1841 il est professeur de théologie dans plusieurs monastères. En fait il s’intéresse à l’histoire du monachisme, constate un relâchement dans le monachisme copte et avec l’accord de ses supérieurs il vise, en passant de monastère en monastère, à chercher les causes de cet affadissement : partout il laisse derrière lui des groupes de moines en attente d’une réforme.
Mais il comprenait que cette crise du monachisme copte venait de la faible formation théologique des moines, et que la solution devait venir d’ailleurs que de l’Ethiopie. Il résolut d’aller à Jérusalem et se joignit à la délégation chargée de demander en 1840 un évêque au patriarche d’Alexandrie, car elle voulait aller à Jérusalem ensuite.
C’est dans cette ambassade que Ghébré-Michael fait la connaissance de Saint Justin de Jacobis. D’abord méfiant, il est conquis ensuite par la sainteté du personnage. Rome d’ailleurs impressionne tant la délégation que quatre ou cinq jeunes gens décident d’y rester pour s’y former en vue du sacerdoce !
Après le passage à Jérusalem et le retour en 1843, Ghébré-Michael essaie de convaincre le nouvel évêque de la nécessité d’une réforme, surtout théologique. Mais celui-ci pressent en son interlocuteur un obstacle à ses projets politiques et tente de le faire empoisonner : Ghébré-Michael échappe car il a toujours sur lui l’antidote au poison habituellement utilisé en ces occasions !
En septembre 1843 il revient trouver Saint Justin et lui déclare qu’il veut devenir catholique. A ce moment, seulement trente-sept Ethiopiens étaient catholiques, et dix en cours d’instruction. En février 1844 Ghébré-Michael est reçu dans l’Eglise catholique, ce qui pousse une demi-douzaine de moines éthiopiens à suivre son exemple.
A partir de la fin de l’année il travaille à établir une résidence permanente pour Saint Justin dans le village de Guala ; l’accueil de la population y est bon. Mais une persécution contre les catholiques se déclenche à l’instigation de l’évêque orthodoxe et Ghébré-Michael est emprisonné pour quelques mois.
Le premier janvier 1851 il est ordonné prêtre à la demande de Saint Justin. Toutefois, comme Saint Justin avait des doutes sur la validité des sacrements conférés par les coptes orthodoxes, au début de 1854 il baptisa et ordonna Ghébré-Michael « sous condition » - c'est-à-dire pour le cas où il n’aurait pas déjà reçu ces sacrements.
Mais en juillet de cette même année, Saint Justin, Ghébré-Michael et quatre autres convertis sont arrêtés. Justin, qui comme on l’a vu a échappé à la mort, parvient à entrer en contact par écrit avec les prisonniers qui ont été torturés plusieurs fois sans qu’on réussisse à leur faire quitter l’Eglise catholique.
En février 1855 le nouveau Négus Théodore arrive au pouvoir après avoir détrôné Jean III, un ancien élève de Ghébré-Michael. En mars il fait fouetter Ghébré-Michael qui est laissé pour mort, mais le lendemain ses blessures étaient guéries miraculeusement. Le Négus décide de l’emmener enchaîné avec lui partout où il ira. En mai, il le fait juger par un tribunal en présence du consul d’Angleterre : celui-ci obtient que le condamné ne soit pas fusillé. Mais il mourra le 28 août, donc en la fête de Saint Georges pour les coptes, toujours enchaîné, au cours d’une marche avec l’armée, dans la province du Wollo.
Il a été béatifié comme martyr en 1926. Les lazaristes le considèrent un peu comme l’un des leurs, du fait qu’il avait manifesté son intention d’entrer dans leur congrégation et que seul son emprisonnement et son martyre l’ont empêché de réaliser cette volonté.
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